L'impasse de la punition à l'école - Des solutions alternatives en classe
Depuis septembre 2018, je suis professeur des écoles, j'enseigne en maternelle, dans deux classes de PS-MS et MS-GS. Avant d'être enseignante, j'étais déjà maman de 3 enfants et la naissance de mon premier fils en 2011 a été le déclencheur d'un long parcours vers une meilleure compréhension du développement de l'enfant, ses besoins et des questionnements permanents sur ce qui est le plus approprié pour lui permettre de bien grandir et s'épanouir.
Pour m'accompagner dans ce cheminement, j'ai beaucoup lu et je me suis formée :
- au portage
- au massage bébé
- à la communication gestuelle avec bébé
- au yoga enfant
- au brain gym
- à l'approche empathique de l'enfant avec Isabelle Filliozat
- à la pratique de l'attention et aux débats philo avec l'association SEVE
- aux émotions et à la gestion des crises avec Isabelle Filliozat
En plus de ces formations théoriques, je les mets en pratique dans mon association Happee Kids, depuis 2016. Je suis donc bien équipée pour proposer un accompagnement respectueux aux enfants, à mes élèves.
Malgré ce bagage, je trouve que ce métier d'enseignant est compliqué. Accompagner 25/30 enfants dans leur développement, dans leurs apprentissages , alors qu'ils ont tous le même âge, les mêmes besoins au même moment, qu'ils n'ont pas choisi d'être ensemble toute la journée, toute la semaine, qu'ils doivent partager un espace et du matériel est difficile.
Je suis surprise qu'à l'ESPE (Ecole Supérieure du Professorat et de l'Education), on ne nous apprenne pas des techniques de gestion du stress, de notre propre stress. Il n'y a pas un jour qui passe sans que je fasse du brain gym et de la pratique de l'attention, qui m'aident tellement pour remplir mon réservoir de patience!
De même avec mes élèves, il n'y a pas un jour de classe qui passe sans qu'on aie partagé ensemble quelques mouvements de yoga, de brain gym, un mini temps de pratique de l'attention ou un partage d'émotion.
Alors, naturellement, quand j'ai vu passer la sortie du livre "L'impasse de la punition à l'école", sous la direction d'Eric Debarbieux, je l'ai dévoré. Et je prends enfin le temps de vous faire un résumé de celui-ci.
1. Les impasses de "la punition"
La punition engendre un important sentiment d'injustice. Les statistiques montrent que le sentiment d'injustice est plus élevé dans l'éducation prioritaire et dépend des conditions locales et des choix éducatifs.
La punition stigmatise les élèves et "l'identité de mauvais élève, de rebelle, se construit à mesure qu'augmentent les taux de punition".
2. La discipline coopérative
La pédagogie coopérative est "une forme d'enseignement dont les apprentissages sont possibles par la coopération entre les personnes sui composent le groupe. (...) coopération : toutes les situations où des individus ont la possibilité de s'entraider par et dans la rencontre éducative"..
Célestin Freinet et Barthélémy Profit sont deux pédagogues qui ont développé cette pédagogie coopérative. Cette approche coopérative repose sur :
- la philosophie selon laquelle le travail de mobilisation des élèves se fait sur des activités dont le résultat a un sens en dehors de l'école
- c'est à travers la réalisation concrète des tâches que les apprentissages se font
- les activités sont systématiquement effectuées de manière collective par échange entre les élèves, ce qui n'empêche pas des moments précis d'individualisation du travail.
3. La discipline positive
Les élèves apprennent mieux et sont plus motivés quand :
- ils ont un sentiment d'appartenance
- leurs enseignants ont un sentiment d'appartenance à leur équipe éducative.
La discipline positive vise à enseigner les compétences émotionnelles et civiques des élèves plutôt qu'à contrôler leurs comportements :
- Aider l'élève à développer le sentiment d'être en lien
- s'appuyer sur la notion de respect mutuel et d'encouragement
- enseigner les compétences sociales, émotionnelles et civiques utiles pour soi et le collectif
- être efficace à long terme
- inviter l'élève à découvrir ce dont il est capable.
4. Le développement des compétences psychosociales
OMS, 1993 : "Les compétences psychosociales sont la capacité d'une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne. C'est l'aptitude d'une personne à maintenir un état bien-être mental, en adaptant un comportement approprié et positif, à l'occasion des relations entretenues avec les autres, sa propre culture et son environnement."
Développer les compétences psycho-sociales des enfants permet de :
- résoudre les problèmes et prendre des décisions
- avoir une pensée créative/critique
- savoir communiquer efficacement/être habile dans ses relations interpersonnelles
- avoir conscience de soi/avoir de l'empathie
- savoir gérer son stress/ses émotions.
5. L'approche systémique et stratégique de l'école de Palo Alto au service des enseignants
Il s'agit d'une observation quasi anthropologique des comportements des élèves et de la manière dont l'enseignant essaie infructueusement de les modifier. Il induit un questionnement des habitudes professionnelles.
Une analyse systémique et une logique d'intervention stratégique peuvent aider un enseignant à lâcher les tentatives de solutions qui entretiennent son problème.
Cette réflexion, qui propose de repenser la marge de manoeuvre dont dispose l'enseignant en classe, ne remplace bien entendu pas celle, plus sociétale concernant les conditions souvent très difficiles dans lesquelles s'exerce cette profession.
Traiter des difficultés du métier d'enseignant est un vaste sujet qui demande une réflexion systémique dans laquelle tous les acteurs du système pertinents soient impliqués et responsabilisés.
6. La communication non violente et les systèmes et cercles restauratifs
"comprendre qu'à chaque instant, derrière chaque comportement, quoi que nous disions, quoi que nous fassions, nous tentons, le plus souvent inconsciemment, de prendre soin de la vie en nous, transforme notre manière de réagir aux comportements des élèves, des parents, des collègues".
L'empathie de l'adulte permet le développement de l'empathie chez l'enfant, la réactivité de l'adulte fait le lit de la réactivité du jeune.
L'écoute empathique permet d'accueillir les jugements, les critiques, les réactions plus sereinement. Au lieu de les prendre pour soi et de réagir, le fait de savoir que toute critique, tout jugement est l'expression tragique et maladroite de besoins insatisfaits, évite de se blesser avec et permet au contraire de se mettre en lien avec la personne.
Les cercles restauratifs sont un espace où chacun peut die ce qu'il vit dans un conflit et reçoit une écoute empathique, qui lui permet de se sentir pleinement entendu.
7. Pratiques de justice restaurative
La justice restaurative se définit comme un modèle de justice complémentaire du processus pénal, qui consiste à restaurer le lien social endommagé par l'infraction par différentes mesures associant la victime, l'auteur et la société. Elle est conçue pour appréhender l'ensemble des répercussions personnelles, familiales et sociales liées à la commission des faits et participe ainsi, par l'écoute et l'instauration d'un dialogue entre les participants, à la restauration de la victime, la responsabilisation de l'auteur, et à l'apaisement, avec un objectif plus large de rétablissement de la paix sociale.
Les fondamentaux sont les suivants :
- les points de vue individuels sont valorisés
- nos pensées influencent nos émotions et nos émotions influencent les actes qui en découlent
- empathie et estime des autres
- il faut identifier les besoins avant de définir des stratégies pour répondre à ces besoins
- responsabilité collective des choix et ses conséquences
Conclusion
Ce livre met en avant des propositions concrètes à s'approprier en tant qu'enseignant, au sein de sa classe, avec ses élèves. Il propose plusieurs témoignages d'acteurs du système éducatif qui ont adopté des principes de communication non violente, de discipline positive, dans leur pratique.
Le livre est disponible ici